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Offrandes


Je faisais mes offrandes quotidiennes à la rivière.

Je laissais les bouts de pain de mie suivre le courant et s’enfoncer dans l’eau où les poissons et écrevisses les attendaient.


Regarder les poissons se nourrir d’offrandes, c’est regarder les esprits de l’eau accueillir nos offrandes. C’est observer visuellement aussi que nos prières sont entendues.

J’étais donc en train d’observer cela, et certains fragments de pain de mie qui voguaient et s’éloignaient en suivant le courant.


Alors que j’étais dans cette contemplation, des bouts de pain de mie passèrent devant moi et suivaient le même courant.

C’était Lucie qui faisait des offrandes en amont du lieu où j’étais. Ses bouts de pain de mie suivaient eux-aussi la rivière et passaient devant moi.


Une compréhension se fit alors en moi, comme un trésor qui se révèle : nos prières suivent des courants qui les emportent au loin. Ce que nous ne voyons pas quand nous prions dans la solitude, c’est que nos prières suivent ces courants, vont parfois visiter d’autres priants ou méditants. Et ces prières et méditations portent leurs effluves lumineuses dans des courants invisibles. Elles se chargent au passage de la lumière de l’invisible.

Même dans la plus profonde des solitudes, une prière n’est jamais seule. Elle appelle un courant invisible pour se déployer. Pour voyager. C’est ce courant qui nous relie entre priants et méditants, et qui nous relie aussi à l’invisible.

Quand nous prions, l’invisible prie aussi. Les deux côtés du miroir s’accordent, il n’y a plus de différences entre le ciel et la terre, plus de frontières.

Qu’il est bon intérieurement d’offrir des offrandes, des prières, de percevoir ce courant lumineux qui n’obéit pas aux lois des hommes. Sentir que cela va. Simplement cela va quelque part. Et le cœur ne peut que se réjouir de ce constat.

Car pour pouvoir faire une offrande à la rivière, il s’agit de se rapprocher de la rivière. De même, pour offrir à l’invisible, il s’agit de se rapprocher des courants invisibles. Et alors, quand on s’y attend le moins, on peut les sentir ces courants invisibles.

Oui, nous pouvons sentir cela.

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