
Mon fils fait l’instruction en famille. C’est-à-dire qu’il ne va pas à l’école. Il apprend avec nous. Et comme il fait cette instruction en famille, chaque année il est inspecté par un inspecteur de l’éducation nationale.
C’était il y a une quinzaine de jours. L’inspecteur était avec nous, installé avec son ordinateur portable sur la table de la cuisine. Il me posait des questions pendant que sa collègue évaluait mon fils dans le salon. Ensuite, ce fut le bilan et l’inspecteur exprimait en direct ce qu’il trouvait positif ou pas dans notre façon d’enseigner au regard de ce que mon fils venait de démontrer.
Et comme il le soulignait à juste titre, mon enfant de 4 ans n’avait pas les premières bases de l’écriture.
- Vous voyez, il devrait travailler sur les formes. Il devrait déjà apprendre à écrire. Vous devriez écrire ensemble.
Je lui demandais donc un peu innocemment :
- Mais vous y arrivez, vous, à écrire correctement ? Depuis tout à l’heure, vous prenez des notes sur un ordinateur, vous arrivez encore à écrire avec de belles formes ?
L’inspecteur m’avoua :
- En fait, plus personne n’écrit à la main dans notre travail. Nous faisons tout sur ordinateur, et effectivement moi comme d’autres collègues avons perdu en lisibilité lorsque nous écrivons.
- Vous êtes bien d’accord que vous demandez à un petit enfant de faire ce que vous en tant qu’adulte ne savez pas faire actuellement ?
- Oui, mais ce sera important qu’il acquière cette compétence, cela lui servira quoiqu’il en soit.
- Pas forcément, ai-je répliqué avec un brin de taquinerie, s’il veut faire le même métier que vous.
Au-delà de l’anecdote, je remarque que nous ne pouvons qu’aller vers la nature.
Ces derniers temps, j’ai été interpellé sur une notion que je n’avais pas encore identifiée.
Lorsque j’écris ces lettres, il m’est proposé de trouver le titre, voire d’écrire la lettre par quelque chose que je ne connais pas. Ce n’est pas un quelqu’un. C’est une baguette magique, avec des petites étoiles, qui me ferait penser que cela arrive comme par magie. Venant de nulle part, sur mon écran, cette baguette magique apparait et me propose : « si vous voulez, je peux écrire le texte à votre place. » Mieux que le correcteur d’orthographe qui lui est invisible et semble appartenir à un âge reculé de l’aide sur ordinateur, cette baguette magique est assez récente.
C’est étrange cette baguette magique. Elle paraitrait bien sympathique et agréable au premier regard. D’ailleurs, repensant à cet inspecteur de l’éducation, je me demande à quoi peut bien servir d’apprendre les leçons, quand une baguette magique peut écrire à votre place.
J’ai ensuite rencontré une conseillère dans le milieu du travail. Elle me dit que dorénavant, les conseillers (c’est comme un inspecteur, mais dans le milieu du travail, un inspecteur devient un conseiller. Ça s’appelle différemment) travaillaient avec des logiciels intelligents qui classent les personnes dans des catégories et avec des implications différentes. Là où avant c’était le conseiller qui classait, suite à des entretiens, c’est dorénavant un logiciel. La fameuse baguette magique.
Je suis sorti de cet entretien et j’ai regardé autour de moi. Je voyais et je sentais tous ces téléphones et ordinateurs. Et je sentais que quelque chose était là, invisible. Cette baguette magique apparait parfois, et vous l’avez peut-être déjà vue. Elle a aussi l’apparence de personnes avec qui vous avez l’impression de discuter. Quelque chose d’invisible qui se montre sous forme de baguettes magiques et de visages souriants.
J’ai voulu clôturer ma petite maison d’édition, c’était trop compliqué administrativement et je souhaitais passer sur un mode plus léger. J’ai suivi les consignes sur mon écran, mais au moment de valider, j’ai eu un bug. Et ce bug ne me permet pas de valider le document de fermeture administrative de l’entreprise. Je suis allé dans différents bureaux, j’ai rencontré des agents et leurs responsables, mais après plusieurs mois, nous ne pouvions que constater que nous n’avions pas d’interlocuteur autre qu’un disque qui répond au téléphone et un visage souriant qui fait tourner en boucle sur un écran d’ordinateur. Après 6 mois de balades de bureaux en bureaux, je suis même allé voir un professionnel dans le domaine, qui va faire une nouvelle tentative après un premier échec. En fait, après un premier contact avec des humains, il y a un niveau inaccessible. Invisible et inaccessible, ou du moins très difficilement accessible.
Cette petite baguette magique et ces visages si souriants, de quelle magie nous parlent-ils ?
Après chaque entretien évoqué précédemment, je suis retourné dans la forêt. Et j’ai senti un gros décalage. Comme si je rentrais dans un autre monde. Une autre énergie.
Cela me fait peut-être prendre conscience de cette magie effective que je retrouve dans la forêt. Le contact direct avec les éléments. Entendre l’eau qui coule dans la rivière. Me sentir accueilli par les arbres et les esprits de la nature.
Il y a réellement plusieurs mondes qui se juxtaposent. Plusieurs niveaux de réalité.
Parfois, je sens une grande tristesse, et je l’accueille. Cela se manifeste quand je passe d’un environnement à un autre. De la ville (ou même le village) à la forêt. Et de la forêt au monde des humains modernes. Il y a des manifestations énergétiques que je ressens d’abord sous formes d’émotions. Comme un petit drapeau qui s’agite sous mon nez pour me dire que quelque chose se passe et que je ne perçois pas si je reste accaparé par les pensées. Alors j’écoute. J’observe.
Je pense que le retour aux forêts est nécessaire pour certains d’entre nous. Pas pour se marginaliser, ni pour se régénérer momentanément, mais pour connecter avec une part essentielle qui perçoit ce qu’est la vie. Ce qu’est l’émerveillement. La beauté ou la magie naturelles.
Au-delà d’un simple retour aux forêts, il y a des parts qui sont aussi à retrouver. Des parts de l’être. Des parts profondes. Peu touchées habituellement. Plus invisibles. C’est ce que j’expérimente avec les diètes de plantes. Ces parts, pour les connecter, un environnement bienveillant est nécessaire. Et la nature a une intelligence qui tend à l’harmonie. Une intelligence profondément bienveillante. Profondément inspirante.
Les esprits de la nature sont plus accessibles dans la nature. Et ces esprits de la nature nous accompagnent dans ce retour à une humanité qui se rappelle ce qu’elle est. Elle nous reconnecte à une forme de magie, un quelque chose de moins grossier qu’une baguette magique sur un écran d’ordinateur.
Oui, en plongeant plus profondément au cœur de nous-même, en laissant notre cœur s’ouvrir comme une fleur, il y a une autre lumière qui contacte ce cœur et tout notre être. Une lumière qui répare, qui soigne, et qui soutient un déploiement radieux. Une lumière qui nous invite à connecter à la vibration de la vie.
Notre cœur palpitant se calme. Il ralentit sa course folle. Il ne suit plus la musique des pensées agitées. Il se calme. Il écoute. Et il entend cette musique que certaines oreilles fines perçoivent. Une musique des esprits de la nature. Et ce cœur qui s’apaise, qui écoute, sent aussi ces vagues d’amour qui viennent à sa rencontre. Il sent aussi ces vagues d’amour qui le traversent et vont vers la forêt, et vers la terre et l’univers entier.
La magie est là. Elle a toujours été là. Tout comme la porte de notre cœur.
Il doit exister d’autres voies, mais je n’en connais pas d’autres. Je ne connais que cette exploration qui se fait en prenant le temps. En s’attardant. Certains appellent cela « méditer ». Oui, s’attarder. Dans un espace extérieur et dans un espace intérieur. Écouter la terre depuis l’intérieur. Écouter sa douce musique. Sentir que la magie est présente et accessible. Patiemment. À chaque pas dans ces mondes magiques, nous recevons des brins d’écorce, des écailles, des plumes, des cristaux… nous recevons notre parure magique. Dans chaque reconnexion avec ces mondes vibrants, nous reconstituons notre corps magique, relié, non séparé, et profondément connecté.
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